« Nous devons protéger les enfants de celles et ceux qui se sont donnés aux malades. »

Transcription du discours

Ce texte est fédérateur. C’est pourquoi j’associe l’ensemble des députés de l’Assemblée nationale, de tous les bancs, à cette initiative qui me dépasse. Je remercie les Présidents FERRAND et LE GENDRE d’avoir permis l’inscription rapide de cette proposition de résolution à notre ordre du jour. C’est une incitation, une injonction à l’action, adressées par les députés au Gouvernement, notamment dans la perspective du 14 juillet. 111 parlementaires ont adressé un courrier au Président de la République en ce sens.

Je souhaite associer mon collègue Philippe GOSSELIN, qui très tôt a partagé cette intuition : la Nation se doit d’être aux côtés des enfants des soignants décédés des suites du covid-19.

Nous ne connaissons pas précisément le nombre de familles concernées par cette proposition. Mais le fait d’avoir été confronté dans ma circonscription à Châteauroux, au décès d’une aide-soignante des suites du covid-19, laissant une famille de quatre enfants, m’a poussé à l’action. Elle était veuve.

Cette situation m’a posé un problème de conscience, qui est devenu politique, et qui explique ma présence devant vous aujourd’hui.

Si ces femmes et ces hommes méritent une meilleure prise en compte de leur quotidien, c’est tout l’objectif des travaux du Ségur, ils méritent aussi une reconnaissance symbolique de leur action et leurs enfants méritent d’être pris en charge par la mère-patrie. Ces applaudis du 20h sont aussi souvent parents. Leur esprit de service et d’engagement pour sauver des vies tout au long de cette pandémie est d’autant plus remarquable qu’il se fait au prix de leur vie familiale.

Ces sentinelles sanitaires sont exposées à la contagion qui n’épargne personne, pas même celles et ceux qui soignent. Rien ne doit faire oublier ces soignants, morts au combat sanitaire, et rien ne doit faire passer à l’oubli ceux qui restent.

Il ne faut pas rajouter à la douleur du deuil, le silence du droit. Dans cette guerre, aucun soldat n’est inconnu.

C’est pourquoi nous proposons de créer un statut de reconnaissance nationale ou d’étendre le dispositif de Pupille de la Nation aux enfants des professionnels de la chaîne de soins décédés des suites du covid-19. Ce dispositif, rédigé dans les circonstances tragiques de la Première guerre mondiale, permet de protéger les victimes collatérales que sont les orphelins de guerre.

Ce dispositif a été étendu à plusieurs reprises pour répondre à des circonstances tout aussi dramatiques : personnes victimes d’actes de terrorisme, fonctionnaires agressés lors de l’exercice d’une mission de sécurité publique, personnels participant à des actions de déminage, personnes victimes de piraterie maritime. Les attentats de 2015 et 2016 qui ont frappé la France, ont entraîné une augmentation d’enfants adoptés par la Nation. 

Cette protection matérielle est assurée par l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre, dont je salue l’action. Leur mission fait écho à cette citation si actuelle du maréchal FOCH « parce qu’un homme sans mémoire est un homme sans vie, un peuple sans mémoire est un peuple sans vie ».

Les enfants adoptés par la Nation bénéficient jusqu’à l’âge de 21 ans du soutien matériel et moral de l’État pour leur éducation. Les subventions d’État, complémentaires aux dispositifs de droit commun, permettent aux enfants de grandir et de s’épanouir, à l’école mais aussi leur temps de loisirs et de vacances. Cela se traduit également plus tard par des aides lors du début de vie professionnelle, ou encore en terme fiscal. 

Grandir sans père ou sans mère est une épreuve, c’est pourquoi la reconnaissance de la Nation se justifie. Nous devons protéger les enfants de celles et ceux qui se sont donnés aux malades. 

Cette proposition de résolution ne doit pas rester un vœu pieux, mais s’accompagner dans les faits par des changements pour les familles endeuillées. Je ne doute pas de l’engagement du Gouvernement, du Ministre de la Santé, de la Ministre des Armées ou du Premier ministre, à faire aboutir notre demande. 

La Nation, aujourd’hui, a besoin de nos voix pour s’élever face à cette épreuve. Comme l’écrivait Saint-Exupéry dans « Citadelle », « pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir mais de le rendre possible ». C’est l’ambition que nous devons collectivement porter pour ces enfants. C’est ce que je vous demande pour eux. C’est ce que l’Histoire nous impose.

Ces enfants ont besoin de votre soutien. 

Je sollicite en leurs noms vos suffrages favorables.