À la faveur des évènements qui ont secoué notre pays, je souhaite exprimer des craintes autant que des espérances

Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Monsieur le Président de la commission des Finances, Monsieur le Rapporteur général, mes chers collègues,

À la faveur des évènements qui ont secoué notre pays, je souhaite exprimer des craintes autant que des espérances.

Au risque d’être répétitif, je rappelle que la crise des « gilets jaunes » ne s’est pas déclenchée en quatre samedis mais couve bien depuis quatre décennies. Le débat public s’est tari en petites phrases, en petits renoncements, au risque d’en perdre le grand récit.

Ce sentiment s’exprime de manière accentuée dans nos territoires ruraux dont sont originaires bon nombre de celles et ceux qui ont exprimé leur colère. Ces territoires font pourtant notre fierté, en tout cas font la mienne, parce que j’en suis issu.

Je veux à ce titre rendre un hommage tout particulier aux maires de petites communes qui doutent aujourd’hui et dont certains ne souhaitent pas se représenter. Ce qui fait figure de respiration démocratique ailleurs, dans les très grandes villes, est dans ces territoires un signe préoccupant qu’il faut prendre au sérieux. Ces maires méritent sans doute un statut, et parfois, au vu de leur détermination et de leur sens de l’intérêt général, une véritable statue.

Le quotidien d’un maire d’une petite commune rurale se vit très souvent à plus de 80km/h.

Les « gilets jaunes » ont exprimé la crise du périurbain. Les rassemblements ont eu lieu sur des rocades, ce qui témoigne d’un étalement urbain. Or, il se trouve que la France des logements est de moins en moins celle de l’emploi, ce qui occasionne, des frais de transports plus élevés et le recours à la voiture individuelle. Chez nous, le permis de conduire n’est-il pas le premier diplôme nécessaire pour travailler en zone rurale ?

Le rapporteur spécial des crédits du logement que je suis vous livre cette intuition : nous avons trop construit, mal construit et pas assez réhabilité pendant trop d’années. Nos Ministres successifs du Logement ont été plus les Ministres de la construction que les Ministres des Habitants.

Notre sujet à tous, lorsque l’on prend du recul, est de résoudre une équation qui allie mobilité, habitat, emploi, santé et vieillissement. C’est ce à quoi nous nous employons.

Nous avons trop longtemps détourné notre attention de l’habitat des cœurs de ville. Et ce désintérêt se révèle avec le drame de Marseille qui témoigne de la démission collective face à l’habitat menaçant ruine.

C’est pourquoi le Groupe la République en Marche est fier de défendre un dispositif d’investissement locatif ciblé en particulier sur 222 villes du plan que l’on baptiste “Mézard”.

Les pouvoirs publics doivent donc cesser de laisser s’effondrer les cœurs de ville et de construire la périphérie.

Ce Gouvernement a décidé de se saisir d’un concept ancien, abandonné, en redonnant la parole au peuple sur ce premier trimestre 2019 : l’aménagement du territoire. Depuis des années, les lois NOTRe et MAPTAM votées dans des majorités sans frontières dans les commissions mixtes paritaires n’ont fait qu’acter et accélérer les déséquilibres entre les régions de France et à l’intérieur des régions. En somme, c’est au moment où on a parlé le plus d’égalité des territoires et des chances données par ces deux lois que les inégalités se sont creusées.

Je fais partie de celles et ceux qui croient que lutter contre les inégalités, qu’elles soient sociales et territoriales est facteur de croissance économique.

Notre stratégie est d’arrêter ce jeu de PACMAN qui percute la vie de nos concitoyens notamment dans leurs rapports avec les services publics et les services aux publics. De manière triviale, nos concitoyens ne supportent plus d’avoir une pression fiscale à la scandinave et des services lointains dont l’illusion de la proximité se trouve sur une page de site informatique, surtout lorsque accéder à internet revêt d’un fantasme dans un certain nombre de territoires.

Ce n’est pas une révolte fiscale que nous vivons aujourd’hui. C’est une exigence citoyenne d’ailleurs rappelée dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen : « La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration » lit-on à l’article 15. C’est plus court qu’un tweet mais beaucoup plus complexe à mettre en pratique.

Décider, c’est savoir expliquer et savoir écouter. C’est pourquoi il est urgent de nous saisir du débat national proposé par le Président de la République et dont le Premier ministre a précisé les contours. C’est un exercice inédit, et donc risqué. Mais, la démocratie est risquée et c’est sans doute pour ce motif qu’elle est combattue et contestée, mais aussi pour cela qu’elle nous est indispensable.

Ce débat sera un moment de vérité. Certains – je le devine – voudront en faire un tribunal ou un marche-pied.

L’action publique doit moins être une guerre de logos qu’un combat constant pour produire des égaux.

Sur la méthode, transformer un Pays exige d’accompagner la conduite du changement. Peut-être avons-nous confondu vitesse et précipitation depuis 18 mois, mais la France avait tellement attendu.

Au fond, le véritable passeur de la transformation c’est l’espoir que l’on donne, les perspectives que l’on trace, le mieux mesurable que l’on apporte à tous et pour tous.

Pour se convaincre de cela, il ne faut être ni subtil, ni intelligent mais simplement comprendre et connaitre la France. Je crois que beaucoup dans les bancs de l’Assemblée, et tous je dirais, ont beaucoup appris depuis quelques semaines.